labrys, études féministes/ estudos feministas
janvier / juin 2013  -janeiro / junho 2013

 

 

« Civiliser les Kanaks »

L’impact de la christianisation sur le système de genre lifou (Nouvelle-Calédonie, 1842-1946)

Hélène Nicolas

 

Résumé : Cet article propose d’examiner la manière dont les missionnaires chrétiens, appuyés par les pouvoirs coloniaux, ont mis en place des politiques de réformes des « mœurs » des Kanaks en Nouvelle-Calédonie, portant notamment sur le système de genre. À Lifou, cadre de cette étude, dès 1842, les missionnaires protestants puis catholiques ont tendu à supprimer les marges de manœuvre qu’avaient les femmes kanakes, par exemple en terme de maîtrise de leur fécondité, sans en créer d’autres, intensifiant ainsi le pouvoir marital. Cette recherche montre que le système de genre des Kanaks de Lifou, considéré bien souvent comme « traditionnel », ancestral, est notamment le fruit du processus colonial.

Mots-clé: réforme, système de genre, Kanaks, colonisation

 

Introduction

La Nouvelle-Calédonie est une colonie française, depuis 1853. Dans cette colonie pénitentiaire et de peuplement, les Kanaks ont subi de nombreuses spoliations foncières, accompagnées de la  mise en réserve des « indigènes » (Merle, 1995). Un tel contexte explique que la société kanake ait connu de profondes transformations,  notamment de son système de genre.

Actuellement, il n’est pas rare que l’influence des pays dits occidentaux soit pensée comme ayant aidé ou aidant les femmes des pays (ex-)colonisés à se « libérer ». Les discours sur la loi « reconnaissant » le « rôle positif » de la colonisation en 2005, ou ceux d’institutions internationales, telles l’ONU ou le FMI, associent fréquemment la diffusion du capitalisme et de la culture occidentale à une soi-disant amélioration du statut des femmes (Falquet 2008). 

Qu’en est-il en Kanaky-Nouvelle-Calédonie ? La colonisation française a-t-elle eu tendance à faire progresser l’égalité entre les femmes et les hommes au sein de la culture kanake ?

 

Une question d’actualité

La Kanaky-Nouvelle-Calédonie est un territoire marqué par une politique coloniale fortement ségrégative. Le code de l’indigénat, appliqué de 1887 à 1946, et le code du travail local, ont distingué différentes catégories de population : les « indigènes », soit les Kanaks (spoliés de leur terre et mis en réserve, puis soumis au travail forcé), les « travailleurs sous contrat » (main d’œuvre généralement importée d’Indochine, « sujets » de la France mais pas citoyens), les « libérés » (les citoyens français sortant du bagne) et les colons « libres »,venus de leur propre gré (Merle 1995, Muckle 2011). Ce régime colonial a eu pour conséquence une forte ségrégation raciale structurant aujourd’hui encore l’économie du pays et ce, en défaveur des Kanaks (Leblic, 1993).

Suite aux révoltes indépendantistes kanakes des années 1980, les Accords de Matignon (en 1988) et de Nouméa (en 1998) sont signés ; ces accords prévoient une politique économique de discrimination positive à l’égard des Kanaks et une décolonisation par référendums successifs. Il faut attendre les années 1990 pour que les catégories de race locale commencent à devenir moins rigides, avec pour effet, par exemple, l’apparition de mariages mixtes entre Kanaks et « Blancs » (Français métropolitains ou Caldoches – les descendants des colons). Dans ce contexte, la construction d’un avenir commun entre les différentes communautés et l’avenir même de la culture kanake sont au cœur des débats.

Depuis les années 1990, des associations de femmes kanakes dénoncent les inégalités entre les sexes et les violences faites aux femmes (Salomon, 2000, Nicolas, 2003). Actuellement, partout en pays kanak, les femmes sont exclues de la possession des terres et de la gestion des chefferies (Salomon et Hamelin, 2010, Nicolas, 2012) : le système de genre est proche de ce que N.C. Matthieu appelle un viriarcat (Matthieu, 1985). Or,

«[...]  parmi les enjeux politiques et sociaux qu’affrontent les populations mélanésiennes de Nouvelle-Calédonie, la transformation des relations « traditionnellement » établies entre les sexes n’est pas des moindres. » (Salomon, 2000 : 311)

Dans les débats locaux sur les modifications des rapports sociaux de sexe kanaks, celles et ceux qui s’expriment en faveur de l’égalité entre les sexes sont fréquemment accusé-e-s de vouloir « détruire la coutume », la hiérarchie de genre étant alors pensée comme ancestrale, typique de la culture kanake. Par ailleurs, quand le débat porte sur le taux fort inquiétant de violences faites aux femmes en pays kanak[1], l’impact colonial est pointé du doigt, les violences de genre étant alors considérées comme le symptôme d’une société « acculturée », en proie à un fort mal-être. La question de l’influence de la colonisation sur le système de genre kanak est un sujet au cœur des interrogations sur l’avenir des rapports de genre en pays kanak.

Mon questionnement a été le suivant : si le système de genre kanak a été modifié lors de la période coloniale, quels en ont été les principaux changements ? Comment cela s’est-il passé ? Y a-t-il eu une volonté politique d’imposer un certain nombre de normes de genre de la part des colons ? Si oui, quels moyens ont été mis en œuvre, par qui et avec quels effets ? Comment les Kanaks ont-ils réagi à ces politiques ? Cet impact colonial a-t-il eu tendance à renforcer ou à affaiblir le pouvoir des hommes sur les femmes en pays kanak ?

 

Un focus sur la christianisation de l’institution de mariage

Étant donné l’ampleur du questionnement, cet article se focalisera sur le mariage et la relation conjugale, dans une des sociétés kanakes, celle de lifoue, et plus particulièrement sur l’influence de la christianisation sur le régime matrimonial.

 Dans l’objectif de mener une recherche sur le renforcement ou l’affaiblissement d’un système de pouvoir, le viriarcat local, j’ai choisi d’analyser la relation conjugale entre Lifous, un des lieux majeurs de l’exercice du pouvoir des hommes sur les femmes. En effet, l’époux dispose de la sexualité, de la progéniture, de la force de travail et des fruits de la production de son épouse. Les maris ont tout à fait le droit d’user de violences physiques et verbales pour se faire obéir de leur compagne. Cette relation est, selon C. Guillaumin,  centrale dans le système de « sexage » (Guillaumin 1992, voir aussi Wittig 2007). Mon objet ainsi défini, j’ai cherché à voir les variations historiques de l’intensité du rapport de domination et d’exploitation au sein de la conjugalité (Lefeuvre, 2002).

Comme la plupart des anthropologues en Nouvelle-Calédonie, j’ai réalisé mon enquête dans une seule des sociétés kanakes. Drehu, ou Lifou, est une des huit aires coutumières kanakes (délimitées en 1988), où se parle une seule des 28 langues kanakes. Il existe une relative homogénéité parmi la population drehu, par exemple en terme de rapports de parenté. J’ai réalisé trois terrains de recherche anthropologique, sur l’île et parmi la population lifoue à Nouméa, entre 2003 et 2007.

Pourquoi se concentrer dans cet article, sur la christianisation ? Parce qu’en Nouvelle-Calédonie, si la prérogative des colonisateurs était de gouverner et de régir l’économie du pays, celle des missionnaires était de convertir et de « civiliser » les Kanaks. Par exemple, les Pères Maristes, catholiques, écrivent en 1905 :

« On ne peut émettre aucun doute sur l'existence du devoir qui incombe au missionnaire d'enseigner les indigènes sur la sainteté du mariage et les charges qui en découlent. C'est la doctrine de la théologie, confirmée par plusieurs décisions des Congrégations romaines (...). »

Dans cette conférence ecclésiastique, ils ajoutent qu'ils doivent absolument « établir parmi les indigènes la vraie vie de famille et la pratique du foyer domestique. » (Compte-rendu des Conférences Ecclésiastiques du Vicariat Apolistique de la Nouvelle-Calédonie, 1905 : 138-139).

Les missionnaires étaient appuyés, militairement, financièrement et parfois juridiquement par le gouvernement colonial, notamment dans leur entreprise de « civilisation » des « indigènes », laquelle comportait une réforme profonde des « mœurs » et donc du système de genre local. Je qualifie cette répartition du pouvoir colonial de « main droite » et « main gauche » de la colonisation. Cette distinction est particulièrement claire en Nouvelle-Calédonie, où les Kanaks ont été mis en réserve et écartés pour la plupart du salariat, ce jusqu’en 1946. Ils ne cohabitaient que peu avec des « Blancs » : seuls les missionnaires et quelques gendarmes vivaient dans des réserves. Si les guerres coloniales, les lois à l’encontre des indigènes, les transformations de l’économie locale, etc., ont eu un impact sur le système de genre kanak, ce sont véritablement les missionnaires qui ont été les principaux acteurs (et témoins) de la transformation de ce dernier.

 

La christianisation de Lifou

En 1842, des missionnaires polynésiens de la London Missionnary Society débarquent à Lifou, soit onze ans avant la colonisation de la Nouvelle-Calédonie et vingt-deux ans avant que l’armée française n’intervienne sur l’île (Howe, 1978). Les missionnaires protestants, polynésiens puis anglais, et les missionnaires catholiques français ont christianisé la population de l’île en une vingtaine d’années : en 1864, tous les Lifous se revendiquent de l’une ou l’autre confession (6000 protestants et 1000 catholiques). Aujourd’hui, la quasi totalité des gens de Lifou se réclament d’une des deux religions ou d’une des nouvelles sectes chrétiennes (Témoins de Jéhova, Pentecôtistes, etc.)

Selon R.K. Howe et Paul Magalue Fizin, les missionnaires ont été accueillis par les chefs locaux, car ils étaient de précieux intermédiaires entre les Lifous et le monde occidental qui s’imposait à eux : ils pouvaient négocier les contrats avec les trafiquants de baleine et de santal, avec les bateaux de commerce, ils maîtrisaient la plupart des technologies occidentales, en apprenaient l’usage aux Lifous (Howe 1978, Fizin 2011). Et, plus que tout, ils connaissaient la culture des colons et pouvaient les conseiller face à la menace coloniale.

Les trois grands chefs de l’île ont rapidement compris que faire des missionnaires leurs conseillers, et pour cela se convertir à leur religion, leur permettrait d’accroître leur pouvoir au sein de l’île. Une fois les chefs convertis, leurs sujets devaient faire de même, par marque d’allégeance. Refuser de se convertir revenait alors à rompre ce lien d’allégeance et provoquer des conflits, potentiellement guerriers. Il ne suffisait cependant pas aux sujets de se dire convertis : la preuve de la conversion était l’adoption des normes chrétiennes de vie, dont de nombreuses normes de genre (voir Malogne-Fer, 2007, pour la Polynésie Française).

Quels ont été les changements souhaités par les missionnaires et que souhaitaient-ils conserver du système de genre local ?

 

Réformer les « mœurs »

Tenter de comprendre quel était le système de genre lifou à l’arrivée des missionnaires et leur influence sur ce dernier pose immédiatement la question des sources disponibles.

Les missionnaires chrétiens, protestants de la London Missionnary Society et catholiques de la Société de Marie, ont abondamment écrit, aussi bien à leur hiérarchie, qu’à leur famille ou encore aux autorités locales. Certain-e-s ont aussi théorisé leur action dans des ouvrages et rédigé des journaux personnels (Macfarlane, 1873, Hadfield, 1920, Leenhardt, 1909, 1949, 1950, Compte-rendu des Conférences Ecclésiastiques du Vicariat Apolistique de la Nouvelle-Calédonie, 1891 et 1905).

Les pères, les pasteurs, les épouses de pasteur et les demoiselles envoyés à Lifou décrivent ici et là le système de genre (sexualité, mariage, pudeur, amour, éducation des filles et garçons, vie conjugale, …), particulièrement ce qu’ils doivent réformer, estimant tel ou tel aspect des « mœurs » contraire à la vie chrétienne. Ils discutent de ce qu’ils doivent encourager, réprouver ou encore interdire.  P. Fizin, historien de la christianisation à Lifou, rappelle la nécessité de contextualiser les sources :

« La notion de  sauver  les peuples du paganisme  en les amenant au christianisme apparait en filigrane dans les écrits tant laïcs que religieux. (…). Il nous faut garder à l’esprit le principal objectif de la littérature missionnaire : l’obtention de fonds en provenance d’Europe. Cette démarche impose au discours missionnaire une relative exagération des faits, afin de susciter une certaine admiration convertible en soutien financier. La bravoure des missionnaires est ainsi mise en exergue ainsi que la barbarie des peuples à christianiser. » (Fizin, 2008 : 29)

Face aux descriptions des missionnaires, il faut bien entendu faire preuve d’une grande prudence : bien des écrits correspondent aux topos sur les peuples « sauvages », assimilant les femmes des populations colonisées à « des bêtes de somme », et leurs compagnons à de « violents barbares ».

La recherche exposée ici repose sur un travail systématique sur les archives des missionnaires catholiques et protestants, ainsi que sur des entretiens menés avec des notables de Lifou, considérés comme les détenteurs de la mémoire orale. Ici encore, les récits de mémoire orale sont à manier avec prudence : bien des idées actuelles sur le système de genre précolonial sont celles véhiculées par les Églises. Cependant, le recueil de mythes (histoires socio-politiques des clans, voir Bensa et Rivierre, 1982), accompagnés de leur exégèse, nous informent tout de même sur les formes de l’alliance pratiquée, notamment pour les chefferies

Les connaissances exposées dans cet article sur le système de genre à l’arrivée des missionnaires reposent sur au moins trois témoignages provenant de sources différentes, écrites et/ou orales». Je présenterai, dans deux tableaux, l’état de mes recherches sur le système de genre lifou préchrétien d’une part, la politique missionnaire à l’égard des différents aspects de ce système, d’autre part, et enfin, les résultats obtenus. Je ne différencie pas les politiques missionnaires protestantes et catholiques sur la question de la réforme des « mœurs », car elles se sont révélées à l’examen extrêmement proches.

 

Tableau 1 : Le système de genre lifou vers 1850 et les politiques missionnaires

 

Au début de la christianisation (milieu du XIXème siècle)

Changements souhaités par les missionnaires

Changements obtenus au début du XXème siècle

Conception typiquement mélanésienne de la nécessaire séparation des sexes, les femmes étant les figures de la pollution (voir Douglas, 2005, et Godelier,  1982).

Ils souhaitent que le couple deviennent le modèle des rapports hommes-femmes : selon eux, les époux forment « une seule chair », où « la femme est le corps et l’homme est la tête ».

La conception de la nécessaire séparation des sexes devient moins présente, sans pour autant disparaître, quand celle du couple croît. L’idée de la complémentarité hiérarchisée entre les sexes est commune aux deux modèles.

Habitat des hommes et des femmes dans des cases séparées.

Présence de cases menstruelles et d’accouchement, réservées aux femmes.

Présence de cases des hommes, notamment destinées aux rites d’initiation masculine.

Ils prônent la création du foyer, où époux et épouses vivent ensemble.

Ils demandent l’abolition des cases menstruelles et d’accouchement, afin que les époux dorment ensemble (dans l’objectif d’éviter l’adultère), et d’interdire les pratiques infanticides et de limitation des naissances.

Les foyers où les époux vivent ensemble sont rapidement créés (dès 1850), les individus y habitant occupant des espaces séparés. Les cases des femmes disparaissent petit à petit. Certaines cases des hommes restent, mais n’ont plus qu’une fonction, celle d’accueillir les réunions, non-mixtes, des chefferies.

Rites d’initiation masculine.

Ils interdisent les rites d’initiation masculine, notamment parce que les « prêtres de l’ancienne religion », les atresi, y officient.

Les rites d’initiation masculine disparaissent rapidement. À la fin du XIXème siècle, la socialisation sexuée est prise en charge au sein d’internats chrétiens non-mixtes pour filles et pour garçons.

Tous les hommes sont considérés comme supérieurs à toutes les femmes.

Pas de modification souhaitée

Pas de changements observés

La politique locale (les chefferies) et la possession des terres sont réservées aux hommes.

Pas de modification souhaitée

Pas de changements observés

Pas suffisamment de données sur les tenues vestimentaires

Ils demandent l’habillement des Kanaks, les hommes à l’européenne, les femmes kanakes avec « robes missions », qui couvrent les bras, le torse et les jambes, pour le culte tout d’abord, puis dans la vie quotidienne.

Dès 1865, les Lifous s’habillent selon les normes chrétiennes, s’ils ont les moyens d’acheter des tissus ou des habits.

Pas suffisamment de données sur la division sexuée du travail

Ils définissent la répartition du travail ainsi : les hommes doivent faire les travaux à l’extérieur du foyer (pêche, chasse, travail salarié) ou qui demandent de la force physique (défricher les champs, abattre des arbres, construire des maisons…).

Les femmes doivent effectuer tous les travaux du foyer (cuisine, ménage, soin et éducation des enfants, couture, jardin, lessive…) et les travaux quotidiens des champs.

Cette répartition du travail, apprise au sein des internats, est effective au début du XXème siècle.

Sexualité préconjugale, mais valorisation de l’abstinence chez les jeunes hommes.

Ils insistent sur la virginité avant le mariage pour les femmes.

Une femme âgée est chargée de surveiller les jeunes époux lors de leur nuit de noce, et de confirmer la virginité de la jeune fille.

Connaissance et usage de techniques contraceptives et abortives et de techniques liées à l’engendrement  (suivi des grossesses et accouchement) par les femmes.

Interdiction de l’usage des techniques contraceptives et abortives.

Les accouchements sont gérés de plus en plus par les sœurs, les femmes de pasteur et les demoiselles. Avoir de très nombreux enfants devient la norme. Disparition progressive des accoucheuses, mais pas de la connaissance de techniques contraceptives et de suivi des grossesses.

Les enfants mis au monde par une femme appartiennent à son frère si elle n’est pas mariée et à son mari si elle est mariée (ils peuvent décider de donner l’enfant en adoption par exemple, sans consulter la femme).

Les missionnaires ne font pas de commentaires sur cette pratique. Ils ne s’y opposent pas.

Pas de changements observés

Lors de la christianisation, le principe hiérarchique entre les sexes – considérés comme complémentaires mais de valeurs inégales – et le contrôle par les hommes des sphères politiques et économiques se font écho dans la culture kanake précoloniale et dans celles chrétiennes, anglaises et françaises.  Les missionnaires ne s’opposent donc pas à ces aspects du système de genre kanak.

Par contre, le contrôle par les hommes de la fécondité des femmes déjà existant en pays kanak, les maris et les frères d’une femme s’appropriant la progéniture de cette dernière, est renforcé par le devoir conjugal, le devoir de virginité des femmes avant le mariage, l’interdiction des cases des menstruelles et des pratiques de limitation des naissances. De même, au modèle mélanésien de la nécessaire séparation des sexes – le contact avec les femmes étant pensé comme dangereux pour les hommes –  se surajoute celui du couple, devant vivre ensemble, dans la même maison, et former « une seule chair ».

Voyons à présent ce que nous savons de la conjugalité et du mariage lifous à l’arrivée des missionnaires et de leur politique de réforme du mariage.

 

Tableau 2 : Le mariage et la relation conjugale lifous vers 1850 et les politiques missionnaires

 

Au début de la christianisation (milieu du XIXème siècle)

Changements souhaités par les missionnaires

Changements obtenus au début du XXème siècle

Polygynie des chefs

Monogamie de tous

Les chefs ont répudié leurs épouses. Les mariages sont monogames.

Peu de cérémonie de mariage

Cérémonie chrétienne de mariage

La cérémonie chrétienne de mariage est présente pour tous les mariages.

Présence de quelques dons cérémoniels pour les familles de haut rang.

Pas de commentaires

Les dons à l’occasion des mariages augmentent fortement, incluant des produits manufacturés[2]. Au début du XXème siècle, les missionnaires réprouvent cette pratique, sans arriver à la contrer.

Union matrimoniale dissoluble (possibilité de répudiation de l’épouse et l’épouse peut quitter son époux en cas de sévices)

Indissolubilité du mariage

Les mariages ne peuvent plus être rompus.

L’épouse peut rentrer chez ses parents de temps à autre, notamment en cas de conflit avec l’époux.

Interdiction à l’épouse de quitter le foyer sans autorisation de son époux (dans le but d’éviter l’adultère en instaurant le « devoir conjugal » permanent).

Les épouses sont ramenées au foyer si elles s’enfuient.

Sexualité avec le conjoint interrompue lors des menstrues, après l’accouchement ou lors de retours des épouses chez leurs parents.

Refuser un rapport sexuel à son époux est un péché : les missionnaires déconseillent les temps d’abstinence et les retours de l’épouse chez ses parents, afin de combattre l’adultère.

Instauration du devoir conjugal continu.

Les parents choisissent fréquemment les conjoints de leurs enfants.

Les missionnaires souhaitent que les époux se choisissent librement.

Ils interdisent de « réserver » les enfants avant l’âge de 7 ans. Les parents continuent de choisir le conjoint de leurs enfants.

Lévirat (le frère cadet hérite de l’épouse de son frère décédé)

Interdiction du lévirat et du remariage après décès des époux.

Disparition du lévirat

Le mari commande son épouse.

Les missionnaires prolongent cette pratique.

Pas de changements observés

Interdit fort de l’adultère, punitions physiques des hommes et femmes adultères.

Les missionnaires prolongent cette pratique.

Pas de changements observés

Violences physiques des époux sur leur épouse.

Les missionnaires le regrettent mais ne prennent pas de mesure l’interdisant.

Pas de changements observés

/

Interdiction de se marier avec quelqu’un-e de la confession concurrente.

Les mariages entre catholiques et protestants sont bannis, sauf si la conjointe accepte de se convertir à la religion de l’époux.

 

 

Avec la christianisation, les époux n’ont plus le droit d’être polygynes et de répudier leurs épouses. Le lévirat disparaît. Cela semble dans un premier temps alléger le pouvoir des maris sur leurs épouses.

Cependant les missionnaires prolongent l’autorité maritale. S’ils réprouvent les violences conjugales des maris, ils ne vont pas jusqu’à les considérer comme une cause d’invalidation du mariage. Car, argumentent-ils, l’autorité du mari est aussi un principe chrétien, comme le rappellent les conférences ecclésiastiques du Vicariat de Nouvelle-Calédonie :

« si la femme est considérée comme une servante, les Apôtres disent : « Mulieres subditas esse viris suis. [« Que les femmes soient soumises à leurs hommes », nda]. » (Compte-rendu des Conférences Ecclésiastiques du Vicariat Apolistique de la Nouvelle-Calédonie, 1905 : 92)

L’autorité du mari et son pendant, la soumission des épouses, le fait qu’elles servent leur mari, sont donc approuvés. La suppression de la possibilité pour une épouse de retourner chez elle voire de quitter son époux enlève à cette dernière des contre-pouvoirs essentiels. De même, les espaces non-mixtes pouvaient soustraire ponctuellement les femmes au contrôle de leur époux, notamment en matière de gestion de la fécondité. Or, ils n’existent plus. L’intensité de l’exploitation de la fécondité, de la sexualité et du travail de l’épouse par son époux dépend dès lors du bon vouloir de ce dernier, sans que l’épouse n’ait de moyens de le contrer. En cela, la politique missionnaire a fortement accentué le pouvoir marital.

Nous avons vu dans ces deux tableaux que les missionnaires ont obtenu de nombreux changements du système de genre, particulièrement de la conjugalité. Comment ont-ils procédé ?

 

Les moyens de la réforme des « mœurs »

 

Tout d’abord, rappelons que tout sujet lifou a dû se convertir à la religion du chef auquel il a fait allégeance. Pression qui en entraînait une autre : tant que les hommes et les femmes n’avaient pas régularisé leur union auprès du clergé, et les hommes polygynes répudié leurs épouses, ils n’étaient pas reconnus comme chrétiens.

Les missionnaires ont également entamé une réelle réorganisation de l’espace et de l’habitat. En effet, les Lifous vivaient en clans ; suite à la christianisation, des membres de différents clans s’installent ensemble autour du temple ou de l’église (et des puits). Les habitats sont dès lors constitués d’une seule case, où dorment ensemble les époux (mais avec des zones réservées aux hommes, d’autres aux femmes). La pratique du « foyer » chrétien s’installe progressivement.

L’apprentissage de l’idéologie biblique a aussi contribué fortement à réformer le système de genre lifou. L’apprentissage de la lecture des textes saints, ainsi que les messes et les leçons de catéchisme, ont connu un réel succès sur Lifou – société où le savoir, oral, était réservé aux personnes de haut rang -

Un autre moyen de réforme a été mis en œuvre par un missionnaire anglais, le pasteur Mc Farlane, qui s’est installé en 1859 à Lifou. Bras droit d’un des trois grand chef de l’île, il a instauré  avec lui un code de lois et monté une police et un tribunal. Les affaires jugées étaient principalement des histoires de « mœurs », concernant des rapports sexuels entre personnes qui n’étaient pas des époux. Les châtiments étaient corporels. Des tournées, mêlant des membres des chefferies et du clergé, étaient organisées, afin de vérifier que les foyers étaient bien tenus selon les normes chrétiennes. Le grand chef pouvait dès lors exercer une autre forme de pouvoir : un droit de regard et de contrôle sur la sexualité et la vie quotidienne de ses sujets, ou une forme de « biopouvoir » (Foucault, 1976). Cette pratique a été partiellement combattue par le pouvoir colonial : en 1864, le gouvernement néo-calédonien, inquiet du pouvoir grandissant du pasteur Mc Farlane et du devenir des missionnaires catholiques français, intervient militairement à Lifou où il installe un poste militaire. Le commandant Guillain menace de fermer les missions, si les missionnaires, protestants mais aussi catholiques, ne se tiennent pas à leur rôle, soit convertir et civiliser. Les missionnaires ne doivent plus se mêler de la politique et de l’économie locale.  Mais ils sont encouragés et même félicités pour le travail de « civilisation » déjà effectué sur l’île. Cela dit, si la police, le code de lois et le tribunal instauré par Mc Farlane ont été interdits, les « conseils des anciens », constitués d’hommes âgés, ont été institués peu après sous le régime de l’indigénat, et ont rempli, finalement, une fonction proche.

Enfin, un moyen central de la transformation du système de genre mis en place par les missionnaires dès les années 1880, a été la construction d’internats non-mixtes, destinés selon M. Salaün, « à protéger l’enfant indigène d’un milieu naturel « corrupteur » et à le transformer le plus radicalement possible en un être « civilisé ». Cette « scolarisation », continue-t-elle, « est constituée de multitudes de techniques disciplinaires visant à inculquer une autre façon d’être » (Salaün, 2003 : 161 et 163). Un de ses objectifs est d’inscrire dans les corps et les mentalités des identités sexuées et des normes conjugales, d’imposer un nouveau modèle de genre (Nicolas, 2010 : 242).

Cette politique menée connût un grand succès. Aujourd’hui, sur le sujet de la conjugalité par exemple, il est fréquemment dit que « la coutume et la religion marchent main dans la main ». Si les religions n’ont pas supprimé d’anciennes croyances, telle celle du caractère polluant et dangereux du sexe des femmes, elles sont de fait pleinement associées pour la gestion et la conception du système de genre lifou, depuis plus d’un siècle.

 

Du côté du gouvernement colonial

De 1853 à 1946, le système de genre idéal véhiculé par les différentes mesures coloniales à l’égard des Kanaks est proche de celui véhiculé par les missionnaires. Si les colonisateurs ne s’occupent pas directement de réformer les « mœurs » des « indigènes », leurs lois et leurs institutions reflètent une conception du système de genre relativement similaire à celle des évangélisateurs.

Par exemple, les  écoles destinées aux indigènes, qu’elles soient laïques ou religieuses, permettent aux garçons kanaks d’obtenir un diplôme, qui n’est pas celui des écoles « blanches » ; alors que les filles kanakes, elles, destinées à être des mères et des épouses, n’ont pas le droit de passer des diplômes et ne sont pas formées en vue d’un travail salarié.

Autre exemple, en 1912-1913, le gouvernement colonial vote une loi interdisant aux femmes kanakes de travailler en dehors des réserves, afin de lutter contre la dénatalité chez les Kanaks. Les femmes kanakes peuvent avoir un travail salarié chez les colons aux abords de leur réserve, mais doivent pour cela avoir l’autorisation de leur père ou mari (comme c’est d’ailleurs le cas pour les citoyennes françaises, sous le code Napoléon).

La place économique des Kanaks en Nouvelle-Calédonie et les mesures restrictives à l’égard des femmes kanakes empêchent ces dernières de profiter du nouveau pouvoir qu’aurait pu leur  conférer l’obtention de revenus autonomes ;  et ce, jusqu’en 1946.

 

Conclusion

En définitive, les pouvoirs coloniaux politico-religieux ont-ils renforcé le pouvoir des époux sur les épouses, ou au contraire ont-ils contribué à affaiblir ce pouvoir, sur la période allant de 1842 à 1946 ?

Nous avons vu que les époux n’ont plus le droit d’être polygynes et de répudier leurs épouses. Cependant, les mesures missionnaires et le cadre colonial suppriment les marges réelles de manœuvre qu’avaient ces dernières vis-à-vis de leurs époux, sans en créer d’autres. En effet, en interdisant les cases des femmes, les cases menstruelles et les retours ponctuels des épouses chez leur parent, ils accroissent la possibilité pour les époux d’user de la sexualité de leur conjointe. De même, en interdisant ces espaces non-mixtes et les pratiques abortives et contraceptives, l’exploitation de la fécondité des femmes s’intensifie. Ni le régime politique colonial ni celui missionnaire ne vont à l’encontre de l’exploitation du travail des épouses, du contrôle par l’époux des fruits de leur production et de leur fécondité. Ils ne remettent pas non plus en question le fait que les femmes kanakes ne possèdent aucun bien matériel. Enfin, si les missionnaires déplorent les violences conjugales, ils suppriment les contre-pouvoirs dont usaient les femmes kanakes pour s’y opposer (tels la séparation ou le retour momentané dans leur famille d’origine).

Le principe hiérarchique entre hommes et femmes et l’autorité des maris sur les épouses se font écho dans la culture kanake précoloniale et dans celle coloniale française, républicaine et religieuse. Je fais l’hypothèse que la christianisation rapide des formes de la conjugalité, à Lifou, et en pays kanak de manière générale, s’explique notamment par le fait que le principe de la domination des époux sur les épouses est proche dans les deux cultures et que la christianisation et les mesures coloniales ont contribué, dans l’ensemble, à intensifier le pouvoir des époux.

De 1946 à nos jours, les femmes kanakes ont petit à petit eu accès à une réelle scolarisation et au salariat, donc à une relative autonomie financière. Les révoltes indépendantistes des années 1980 ont aussi fait le lit des revendications de justice à l’égard des femmes, notamment par le biais d’associations de femmes.

Cependant, on peut constater depuis une dizaine d’années un certain backlash. En effet, les citoyennes françaises kanakes sont de droit particulier, c’est-à-dire que leur droit civil est régi « par la coutume » ; coutume, qui, comme nous l’avons vu, a subi de nombreuses transformations. Jusque ces dernières années, des femmes kanakes changeaient de statut civil afin de faire appel aux lois françaises pour divorcer ou dénoncer des violences. Or, dans le processus de « décolonisation de la justice », le Sénat Coutumier a obtenu l’interdiction de changer de statut[3]. Ce Sénat légifère sur le code civil kanak, renforçant à nouveau le pouvoir des époux, puisqu’entre autre, divorcer devient de fait  impossible.

Une interlocutrice lifou résumait fort bien la situation actuelle des femmes kanakes :

« Quand ce n’est pas la coutume pour justifier de nous écraser, c’est la religion. Et aujourd’hui, quand tu veux faire appel au tribunal des Blancs, ils te disent  que tu dépends du droit coutumier... » (Anonyme, Lifou, 20/02/2006)

Nous pouvons nous demander si le récent pouvoir juridique accordé au Sénat Coutumier, dans le cadre du processus de reconnaissance de la culture kanake, en ceci qu’il reconnaît avec difficulté les droits des Kanaks sur le sol et l’économie du pays, quand il le fait  aisément des « traditions » viriarcales qui, elles, ne perturbent en rien le système colonial.

 

 Bibliographie

Bensa Alban et Jean-Claude Rivierre. 1982. Les Chemins de l’alliance. L’organisation sociale et ses représentations en Nouvelle-Calédonie. Paris : Éditions Selaf.

Douglas, Mary. 2005. De la Souillure : Essais sur les notions de pollution et de tabou. Paris : Éditions La Découverte ; première édition, 1966.

Falquet, Jules. 2008. De Gré ou de force. Les femmes dans la mondialisation. Paris : Éditions La Dispute, coll. Le Genre du Monde.

Fizin, Magalue Paul. 2008. Lifou 1793-1923 : histoire des contacts entre Kanak et Européen. Bordeaux : mémoire de maîtrise d’histoire contemporaine, dirigé par Sylvie Guillaume et Claire Laux, Université de Bordeaux III, multigraphié, 127 p.

2011. Des sentiers coutumiers au chemin du « Lotu » : le rôle des insulaires du Pacifique lors de la diffusion des protestantismes en Mélanésie (Fidji, Vanuatu, Nouvelle-Calédonie, Nouvelle-Guinée, Archipel du Détroit de Torrès) 1830-1900. Bordeaux : Thèse de doctorat d’histoire contemporaine, dirigée par Claire Laux, à l’Université de Bordeaux III, multigraphiée, 439 p. 

Foucault, Michel. 1976. Histoire de la sexualité 1. La volonté de savoir. Paris : Éditions Gallimard.

Godelier, Maurice. 1982. La Production des Grands hommes, Pouvoir et domination masculine chez les Baruya de Nouvelle-Guinée. Paris : Éditions Fayard.

Guillaumin, Colette. 1992. « Pratique du pouvoir et idée de Nature » in Sexe, race et pratique du pouvoir. L'idée de nature. Paris : Éditions Côté-Femmes, pp. 13-82 ; premières éditions 1977 à 1990.

Hadfield, Emma. 1920. Among the Natives of the Loyalty Groups. London : Mac Millan and Co.Hamelin, Christine et Christine Salomon.

2004. Genre et ethnicité des violences intra-familiales en Nouvelle-Calédonie. Paris : Rapport de l'INSERM, multigraphié, 15 p.

2010. « Vers un changement des normes de genre », in Faugère, Elsa et Isabelle Merle (dir.). La Nouvelle-Calédonie, vers un destin commun ? Paris : Éditions Karthala, pp. 203-224.

Howe, Kerry Ross. 1978. Les Îles Loyauté. Histoire des contacts culturels de 1840 à 1900. Nouméa : Société d’Études Historiques de la Nouvelle-Calédonie, ; première édition, 1977.

Leblic, Isabelle. 1993. Les Kanak face au développement : la voie étroite. Grenoble : Presses Universitaires de Grenoble / Agence de Développement de la Culture Kanak.

Lefeuvre, Nicky. 2002. « Le genre comme outil d'analyse sociologique », in Fougeyrollas-Schwebel, Dominique, Planté, Christine, Riot-Sarcey, Michèle et Claude Zeidman (dir.). Le genre comme catégorie d'analyse. Sociologie, histoire, littérature, Paris : L'Harmattan, Bibliothèque du féminisme/ RING, pp. 39-78.

Leenhardt, Maurice.1909. La Grande Terre, mission de Nouvelle-Calédonie. Paris : Société des missions évangéliques.

 ----1949. « Mariage et société ». Le Monde Non-Chrétien, n°11, pp. 359-370.

----1950. « Cérémonies et sceau du mariage », Le Monde Non-Chrétien, n°15, pp. 321-335.

Malogne-Fer, Gwendoline. 2007. Les Femmes dans l'Église protestante mâ'ohi. Religion, genre et pouvoir en Polynésie française. Paris : Éditions Karthala.

Mathieu, Nicole-Claude. 1985. « Quand céder n’est pas consentir. Des déterminants matériels et psychiques de la conscience dominée des femmes, et de quelques-unes de leurs interprétations en ethnologie », in Mathieu, Nicole-Claude (éd.). L’Arraisonnement des femmes. Essais en anthropologie des sexes. Paris : Éditions de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales, pp. 169-245.

Merle, Isabelle. 1995. Expériences coloniales. La Nouvelle-Calédonie (1853-1920). Paris : Éditions Belin.

Muckle, Adrian. 2011. « ‘Natives’, ‘immigrants’ and ‘libérés’ : the colonial regulation mobility in New-Caledonia », Law, text, culture, n°15, pp. 135-161.

Nicolas, Hélène. 2003. Sortir de l’ombre. Étude anthropologique des associations de femmes à Lifou, Nouvelle-Calédonie. Site de recherche sur les enjeux sociaux contemporains en Nouvelle-Calédonie, www.recherches-nouvelle-caledonie.org, (page consultée le 10/02/2013).

----2005. Devenir femme-sœur-épouse. Les formes multiples et changeantes de la socialisation sexuée à Lifou (Nouvelle-Calédonie). Site de recherche sur les enjeux sociaux contemporains en Nouvelle-Calédonie, www.recherches-nouvelle-caledonie.org, (page consultée le 10/02/2013).

----2010a. « Emporter un diplôme dans son sac. Les transformations de la socialisation sexuée à Lifou, Nouvelle-Calédonie ». in Merle Isabelle, Faugère Elsa (dir.), La Nouvelle-Calédonie, vers un destin commun ? Nouveaux enjeux, nouveaux terrains, Éditions Karthala, Paris, pp. 225-244.

----2010b. « The impact of Decolonisation on Kanak Girl’s School Success (Lifou, New-Caledonia), Journal of Polynesian Society, n°2, vol 119, pp. 181-204.

----2012. « La Fabrique des époux. Approche anthropologique et historique du mariage, de la conjugalité et du genre (Lifou, Nouvelle-Calédonie) ». Tome 1 et Tome 2. Thèse de doctorat. Site de recherche sur les enjeux sociaux contemporains en Nouvelle-Calédonie, www.recherches-nouvelle-caledonie.org, (page consultée le 10/02/2013).

Salaün, Marie. 2003. « Histoire blanche, histoire noire : la perception de l'école indigène en Nouvelle-Calédonie », in Merle, Isabelle et Michel Naepels (éds.). Les Rivages du temps. Histoire et anthropologie du Pacifique. Paris : L'Harmattan, Cahiers du Pacifique Sud Contemporain, pp. 135-163.

Salomon, Christine. 2000. « Hommes et femmes. Harmonie d’ensemble ou antagonisme sourd ? », in Bensa, Alban et Isabelle Leblic (éds.). En Pays kanak. Ethnologie, linguistique, archéologie, histoire de la Nouvelle-Calédonie. Paris : Mission du patrimoine ethnologique, Éditions de la Maison des sciences de l'homme (Ethnologie de la France, 14), pp. 311-338.

Wittig, Monique. 2007. La Pensée straight. Paris : Éditions Amsterdam ; premières éditions, 1980-1999.

 

Archives 

Archives d’Outre-Mer, Aix-en-Provence

Ministère des Colonies. Généralités. Tenues et vérifications des actes. Modèles. Documents généraux. 24 Thermidor an 12. Carton 390, dossier 22 37. Archives d'Outre-Mer, Aix-en-Provence.

Ministère des colonies, affaires générales. Instructions aux administrateurs des colonies concernant les dispenses pour mariage. 1810-1832. Carton 387. Dossier 2230. Archives d'Outre-Mer. Aix-en-Provence.  Et Ministère des Colonies. Généralités. Tenues et vérifications des actes. Modèles. Documents généraux. 24 Thermidor an 12. Carton 390, dossier 22 37. Archives d'Outre-Mer, Aix-en-Provence.

Journal officiel de la Nouvelle-Calédonie, 1893-1946.

Archives de Nouvelle-Calédonie, Nouméa

Service des Affaires Indigènes, sans date (des années 1920 ou 1930), « Coutumes des indigènes de la Nouvelle-Calédonie et Dépendances, recueillies d'après les renseignements donnés par les Syndics et Délégués », dactylographié, 26 pp., Archives de Nouvelle-Calédonie, 97W11, Archives de Nouvelle-Calédonie, Nouméa.

 

Archives de la Société de Marie, Rome

Lettre du P. Fabre au P. Yardin, mars 1860, APM 1451, 20 637.

Lettre du P. Fabre au Père Yardin, mai 1860, APM IV, ONC, PMB 162.

Lettre du P. Fabre au Révérend Père ?, le ? (entre 1864 et 1867), APM 1451, 20 637.

Lettre du P. Fabre au P. Rougeyron, le 13 décembre 1867, APM 1451, 20 637.

Lettre du R.P. Gaide au R.P. Supérieur Général, le 20 janvier 1861, APM 1449, 20 609.

Lettre du R.P. Gaide au R.P. Supérieur Général, mars 1864, APM 1449, 20 609.

style="text-autospace: none"> Lettre du R.P. Gaide au P. Fabre, le 15 mai 1866, APM 1449, 20 609.

Notes historiques sur Lifou, par le R.P. Gaide, d'après les notes du R. P. Fabre, APM 1439, 20 464.

Compte-rendu des Conférences Ecclésiastiques du Vicariat Apolistique de la Nouvelle-Calédonie, 1891, Saint-Louis, imprimerie catholique, 282 p.

Compte-rendu des Conférences Ecclésiastiques du Vicariat Apolistique de la Nouvelle-Calédonie, 1905, Saint-Louis, imprimerie catholique, 282 p.

DEFAP, Paris

>Lettre de P. Delord, Maré, février-mars 1905. In SMEP/DEFAP Paris, Correspondances des champs de mission. 1904, N°2041. Archives microfiches du DEFAP, Paris.

Rapport de M. Ph. Delord, année 1900, Maré, le 31 décembre 1900, DEFAP, archives SMEP, Défap, Service Protestant de Mission, Chemise Nouvelle-Calédonie, Maré Iles Loyauté, 1900.

Compilation des rapports des missionnaires de Nouvelle-Calédonie de la Société des Missions Évangéliques de Paris, 1900-1950, Archives du DEFAP, Service Protestant de Mission, Paris.

Pacific Manuscrits Bureau, Sydney

Peter Eugénie, Lettre du 22 octobre 1950 à sa famille. Letters from Lifou, 1923 – 1951. PMB (Pacific Manuscrits Bureau), 1011.

Bibliothèque Nationale de France

Lettre du commandant des Loyalty, M. Guillanton, au Révérend Sleigh, du camp de Xepenehe, le 26 septembre 1864. Archives de la BNF Tolbiac, Council for World Mission Archives, South Seas, Odds, Box n° : 1-1864, n°2244.

Lettre du commandant des Loyalty au Révérend Sleigh, le 1er mai 1865. Archives de la BNF Tolbiac, Council for World Mission Archives, South Seas, Odds, Box n° : 1-1865, n° 2247.

Lettre du commandant des Loyalty, M. Guillanton, au Révérend Sleigh, du camp de Xepenehe, le 25 septembre 1869. Archives de la BNF Tolbiac, Council for World Mission Archives, South Seas, Odds, Box n° : 1-1864, n°2244.

 

Note biographique

Hélène Nicolas a réalisé des recherches sur les transformations du système de genre kanak de Lifou, de 2003 à 2012. Étudiant d’abord les associations de femmes kanakes, elle s’est ensuite intéressée aux transformations de la socialisation sexuée au sein de l’école et de la famille, de 1946 à nos jours. Elle a réalisé son doctorat sur l’impact de la colonisation sur le mariage, la conjugalité et le genre lifou. Elle a co-rédigé par ailleurs un ouvrage sur les transformations des conditions d’avortement à Grenoble, de 1960 à 2006.
NICOLAS Hélène, docteure en anthropologie, ATER en sociologie à l’Université de Rennes 2, membre du CREDO (UMR 6574).
Contact : helenicolas@no-log.org

 


[1] Par exemple, selon l’enquête ENVEFF de 2004, une femme kanake sur trois déclare avoir subi des violences physiques de la part de son conjoint dans l’année (Hamelin et Salomon, 2004).

[2] Suite à l’interdiction des guerres inter-claniques et de la polygynie, la puissance des clans repose davantage sur leur insertion dans la nouvelle économie marchande et sur la qualité des alliances matrimoniales contractées. On assiste alors, dès la fin du XIXème siècle, à une véritable guerre des dons, symboles du prestige et de la puissance d’un clan, lors des rituels matrimoniaux.

[3] Créé en 1999, suite à l’Accord de Nouméa, le Sénat Coutumier est l’assemblée des différents conseils coutumiers du pays kanak. Il est saisi des projets et propositions de loi du pays ou de délibération relatifs à l’identité kanake. Le Sénat Coutumier est composé de seize membres désignés par chaque conseil coutumier, selon les usages reconnus par la coutume. Il est composé généralement des grands chefs, et est donc entièrement masculin.

 

labrys, études féministes/ estudos feministas
janvier / juin 2013  -janeiro / junho 2013